Arrivé  à un certain âge on pleure plus facilement en regardant un film, plutôt que pour la mort d’un proche. Cela peut paraitre étrange.

Quand j’ai commencé le livre de Germain, le premier chapitre “  Cette soirée ne sera pas comme les autres ”  m’a tout de suite enthousiasmé.

Je l’ai terminé assez rapidement ne perdant aucun mot. Pendant la lecture, j’ai été pris par l’émotion et chose rare avec un livre, j’ai versé une larme.

J’ai bien sûr continué la lecture, ce fut simple, c’est très bien écrit et les différentes étapes de la vie de Germain, son enfance en Bourgogne.

“  Je sens  l’herbe humide sous mes orteils. Je vais avoir les pieds sales de la terre…Je risque de me faire engueuler si je ramène des saletés sur le parquet ciré…

J’appuie sur Play et cours rejoindre l’espace infini du jardin, le ciel est ma seule limite. Je suis excité et heureux…J’ai envie de libérer, de crier cette énergie folle qui galope en moi. Mais aucun son ne sort, car à sa place c’est mon corps qui se met à se mouvoir.

 Ce cri, je le danse. ” 

Germain a quatre ans à cette époque.

A l’été 2008, il a quinze ans, dans les Landes,  avec ses deux amis, son amie Tiphaine et son meilleur ami Lou, ils rencontrent deux jeunes qui s’emmerdent comme eux, dit-il. L’un des deux s’appelle Alexis. De suite il perçoit quelque chose d’inédit dans sa manière de le considérer. Il prend conscience de sa différence.

Ses parents très compréhensifs l’ont accepté tel qu’il était.

A quatre ans, ils acceptent qu’il fasse de la danse et l’inscrivent à l’école de danse de Givry.

A douze ans, il intègre l l’école de danse de l’Opéra de Paris, située à Nanterre et construite par Christian de Portzamparc.

L’aventure commerce.

Ce n’est pas évident quand on a 12 ans, que l’on vit en province de prendre le TGV, puis le RER direction Nanterre.

Mes parents sont inquiets à chaque trajet et stressés à l’idée de me laisser seul dans les méandres des transports en commun de Paris. Cela a été un sujet sensible dès la nouvelle de mon admission à l’école de danse de l’Opéra de Paris.

Contrairement aux autres élèves, lui, ne s’ennuie pas de ses parents, non, qu’il ne les aime pas, mais contrairement aux autres, il ne les appelle pas tous les jours, mais le vendredi soir pour les prévenir qu’il arrive qu’il arrive pour le week-end.

Le livre continue  avec  “ Les codes ”, “  Intransigeance ”

 En mars 2021, à l’Opéra Garnier, le cœur battant, il franchit la porte du studio Noureev pour une audition, ils sont neuf danseurs, sachant qu’il n’y en aura qu’un choisi pour le rôle et la pièce : « Le Jeune Homme et la Mort ».Ils sont bienveillants les uns envers les autres.

Cette audition est sans aucun doute l’expérience la plus désagréable que j’ai pu vivre dans un studio de danse. Nous traversons de nombreuses épreuves à ce niveau-là, le milieu n’est pas tendre : concurrence, frustration, acharnement, dévotion, blessures, jalousie, déception… ce cocktail peut rendre amers ceux qui ne guérissent jamais de toutes ces plaies et se consolent en les infligeant à d’autres

Germain va continuer son chemin, en  décembre 2005, l’Opéra de Paris redonne La Bayadère. Benjamin Millepied, directeur de la danse décide de renommer le rôle des «  négrillons » en «  enfants de l’idole dorée ». Pour lui la blackface appliqué à des enfants n’est plus acceptable, et encore moins sur une scène, celle de l’Opéra de Paris.

La suite du livre est passionnante, prenante, on y prend du plaisir.

Comme partout, la Covid a modifié les comportements, plus de spectacles, mais le 23 décembre 2019, les danseurs et danseuses, vont envahir le parvis de l’Opéra Garnier et danser, devant un public qui passe, le bruit de la rue. Qu’importe, ils sont là.

L’Epilogue est important

Il faut résister. Résister contre la peur, contre la bêtise naissant souvent de la peur….Finalement, danse est déjà le fruit d’une résistance…Danser, c’est aller à contre-courant. C’est accepter de se faire violence pour se faire du bien. C’est aussi baiser. Prendre conscience du rapport sexuel de notre corps au monde, à l’espace des autres…C’est bander sans complexe, en être fier, de la manière la plus pure et la plus saine qui soit…Laissons vivre nos passions. Laissons-nous vivre tout simplement.

C’est vraiment un livre très important.  Les professeurs des écoles, des collèges et lycées devaient parler de ce métier. Celui de danseur ou danseuse, qui est un métier dur, qui demande beaucoup de contrainte, mais peut donner un plaisir immense.

Cette année Germain Louvet a été nommé Danseur Etoile à la fin d’une représentation de La Bayadère dans le rôle de Solor.

Je suis allé voir ce spectacle, il ne dansait pas ce soir-là, mais j’ai adoré, il y a trois actes. Au dernier, on se rend compte de l’exploit du corps de danse, les danseuses en tutu qui restent de longues minutes sur la pointe des pieds, aucun de nous ne serait capable de le faire 2 mn.

Je n’ai qu’un conseil à vous donner, achetez ce livre, comme moi, je pense que vous allez aimer, tomber sous le charme de Germain Louvet.

“Des choses qui se dansent” de Germain Louvet aux Editions Fayard – 19€ dans toutes les librairies.

Lors de la présentation de ma sélection des livres à lire durant les grandes vacances, celui-ci sera en première place.