« Camilla, 30 ans, Connasse née, se rend compte qu’elle n’a pas la vie qu’elle mérite et décide que le seul destin à sa hauteur est celui d’une altesse royale. »
Interview de Eloïse Lang & Noémie Saglio
Si l’on devait remonter aux origines de « Connasse », vous souvenez-vous à quand remonte l’idée de ce personnage ?
Eloïse Lange : Tout est parti d’une rencontre sur une plage un été en Corse. On s’est tout de suite bien entendu et vu que nous faisions le même métier d’auteur, on s’est dit qu’il fallait travailler ensemble !
Noémie Saglio : Tout est allé assez vite en fait, au bout de quelques réunions de boulot où nous avions aussi pensé à un personnage de « fashista », une sorte de personnage très fashion et très fasciste !
EL : Il faut dire aussi qu’à la base de « Connasse », il y cette envie très « girl power » d’aller à l’encontre de toute une galerie de personnages très masculins dont la fiction télé avait fait le tour selon nous… J’ai envoyé un texto à Noémie en lui disant : « ça te dirais de faire un truc autour d’une « connasse » et elle m’a immédiatement répondu « mais bien sur » ! Très rapidement nous avons écrit une « Bible » qui définissait exactement que cette fille serait un vrai personnage, avec ses occupations, son langage, ses réactions
A la base, comment est née la « Connasse » : est-ce une sorte de puzzle de femmes et de filles que vous avez vraiment croisées ?
NS : Oui c’est un mix de choses vues, entendues avec cette question : « qu’est-ce que j’aurais aimé dire ou répondre dans cette situation-là » ? L’humour de « Connasse » part d’un principe : ne jamais être gratuit, ne pas balancer des vannes comme elles viennent et c’est sans doute pourquoi les gens se sont attachés à elle, parce qu’elle ose dire tout haut ce que tout le monde pense… En général, ce sont des réactions très énervantes, motivées par son impatience ou sa frustration. Dans une animalerie par exemple, elle va vouloir une bestiole qui ne fait ni pipi ni popo et comme ça n’existe pas, ça va l’agacer ! Ses désirs, ses volontés sont toujours bien au-dessus de ce que le commun de mortels peut attendre de la vie… En fait, « Connasse » ne supporte pas la médiocrité et elle a beau être parfois abominable, on s’attache à elle parce qu’elle nous ressemble. C’est aussi une photographie sociétale et critique du monde qui nous entoure… Mais ce qui est fou, c’est que sans jamais chercher à faire quelque chose d’universel ou de fédérateur, nous avons réussi à toucher les gens…
EL : Le processus créatif de « Connasse » est basé sur des étapes très précises et rigoureuses de réflexion, d’écriture, de choix multiples de situations et des conséquences potentielles des unes par rapport aux autres. Nous avons nourri le personnage de repérages sur le terrain, afin de ne pas tomber dans les travers du déjà vu ou de la facilité. On essaye en permanence de cueillir le spectateur et d’alimenter notre scénario.
Questions/réponses après la projection :
Il faut maintenant parler de la manière dont vous avez réussi à tourner : tout au long du film, on se demande comment vous avez fait, quels subterfuges vous avez utilisé…
NS : Chaque scène a trois scénarios. Celui du film, (là où nous voulons arriver), celui du « piège », (la façon dont s’installe la situation) et celui de Camille, (la manière dont elle va réagir et enchainer)… Il ne fallait qu’à aucun moment les interlocuteurs de la « Connasse » ne se doutent de ce qui se passait, d’autant que, (pour pouvoir tourner et enregistrer le son), Camille était souvent accompagnée d’une autre personne, une cadreuse déguisée par exemple. Donc, nous devions justifier auprès de nos interlocuteurs qui était cette personne, que ce soit cohérent. Ce pouvait être son assistante, sa meilleure amie, une cousine de province, tout dépendait de la situation.
EL : Quant à nous, il fallait trouver l’endroit où nous cacher ou bien expliquer notre présence, même sous un déguisement. Et puis comment amener les caméras dans la scène, souvent cachées dans des sacs qu’il fallait par exemple faire passer les portiques de sécurité dans certains endroits ? Et si nous nous faisions arrêter par la police, que devions nous dire ?
NS : Ca, c’est le 4e scénario : l’enfumage ! Généralement, on riait bêtement en prétextant un enterrement de vie de jeune fille et nous étions embarquées toutes les trois mais le reste de l’équipe était sauvé et pouvait récupérer ce que nous avions tourné ou enregistré… Le moment où Camille escalade les grilles de Kensington ne pouvait avoir lieu qu’une fois par exemple. Cette scène a été minutieusement préparée pendant des heures, avec des plans aériens du site, en définissant le lieu où chacun serait disposé et sous quel déguisement…
Si le film est un succès, avez-vous toutes les trois l’idée ou l’envie de retrouver la « Connasse » un jour, quelque part ?
EL : Ce qui est certain, c’est que nous l’aimons toujours autant. Mais ce qui va devenir compliqué c’est que nous ne sommes pas seules à l’apprécier. Nous sommes parties de Paris pour tourner à Londres parce que les gens reconnaissaient Camille dans la rue et qu’étant des « ayatollahs » de la vérité, il n’était pas question de truquer quoique ce soit… Tout dépendra évidemment de l’accueil réservé au film et sur le fond, ça se passera comme nous l’avons toujours fait : à l’envie !
Faire un film en CAMERA CACHÉE est un enjeu difficile, d’autant plus que les sketchs télé durent 2 à 3mn, mais là, il faut un scénario et plein d’ingéniosité pour que les personnes ne sachent pas qu’elles sont filmées.
C’est un pari réussi, j’ai beaucoup ri, pris du plaisir.
A voir, sans faire trop référence aux sketchs!!!
Sortie en salle le : 29 avril 2015